Constituer une réserve de liquidation peu avant la liquidation de votre société: y a-t-il un risque d'abus fiscal?
La Commission de ruling a confirmé qu'une société composée d'actionnaires admis à la retraite ne commet pas d'abus fiscal si elle constitue une réserve de liquidation peu avant sa liquidation. Plus précisément, le demandeur de la décision anticipée souhaitait constituer une réserve de liquidation avec la plus-value réalisée par la société sur la vente de deux biens immobiliers.
Quel est l'intérêt de constituer une réserve de liquidation?
- Un précompte mobilier de 5% s’applique, si la réserve est versée au plus tôt après un délai d'attente de 5 ans (de sorte que l'impôt total s'élève à 13,64%, soit 15/110).
- Un précompte mobilier de 20% s'applique, si le versement est effectué avant le délai d'attente de 5 ans.
- Aucun impôt n'est dû en cas de liquidation de la société (de sorte que l'impôt total s'élève à 9,09%, soit 10/110).
Quelles sont les modifications prévues par le projet de loi-programme pour le régime de la réserve de liquidation?
Le délai d'attente serait raccourci de 5 à 3 ans, mais l'impôt sur le versement après le délai d'attente passerait de 5% à 6,5%. Cette disposition s'appliquerait aux réserves de liquidation constituées à partir du 1er janvier 2026. Selon le projet, vous aurez la possibilité d'utiliser ce nouveau régime à partir du 1er juillet 2025 pour les réserves de liquidation constituées avant le 1er janvier 2026. Concrètement, ces réserves de liquidation pourront déjà être versées après 3 ans, moyennant un précompte mobilier de 6,5%.
Le projet de loi-programme ne prévoit aucune modification de la taxation en cas de liquidation de la société.
Nous partons du principe qu'à l'avenir, vous pourrez aussi verser les réserves de liquidation constituées sans payer d'impôt en cas de liquidation de la société. Vous pouvez donc en principe bénéficier d'un avantage fiscal considérable en constituant une réserve de liquidation, surtout en cas de liquidation ultérieure.
Décision anticipée n° 2024.0658 du 3 décembre 2024
En réponse à une question parlementaire en 2015, le Ministre des finances de l'époque a déclaré qu'une société en liquidation peut constituer une réserve de liquidation si elle réalise encore des bénéfices imposables pendant la durée de la liquidation. Il a toutefois précisé que cela s'appliquait uniquement "sans préjudice de l'application de la mesure générale anti-abus".
La question est donc de savoir s'il y a "abus fiscal", lorsqu'une société constitue une réserve de liquidation peu avant sa liquidation effective ou peu avant sa dissolution et sa liquidation en un seul acte.
La décision susmentionnée concernait deux actionnaires âgés de 70 ans qui souhaitaient dissoudre et liquider en un seul acte en 2025 la seule société qu'ils détenaient encore. En 2024, la société comptait encore vendre deux biens immobiliers et constituer une réserve de liquidation avec la plus-value réalisée.
La Commission de ruling est arrivée à la conclusion qu'il n'est pas question d'abus fiscal, sans toutefois donner de raisons. Il ne peut en principe être question d'abus fiscal que lorsque des actes contraires aux objectifs de la réserve de liquidation sont posés. Le législateur a indiqué (au moment de l'introduction de la réserve de liquidation) que ce régime devait permettre aux indépendants de transférer leur épargne accumulée dans leur patrimoine privé lors de la liquidation de leur société (moyennant le paiement d'une cotisation distincte de 10% au moment de la constitution de la réserve de liquidation). En ce sens, la décision de la Commission de ruling semble logique.
En principe, seul le demandeur de la décision anticipée peut tirer des droits de la décision demandée. Vous devez donc demander vous-même une décision anticipée pour en avoir la certitude.
La "décision anticipée" décrite ci-dessus ne peut pas être généralisée.
Dans certains cas, nous estimons qu'il peut bel et bien être question d'abus fiscal. Nous songeons notamment au cas où une société qui a constitué des réserves de liquidation est liquidée, mais poursuit en réalité ses activités par le biais d'une nouvelle société. Cela a également été confirmé dans le rapport annuel de 2021 de la Commission de ruling.
Il nous semble évident qu'il n'existe alors aucune justification économique à la liquidation de la société (et à la perception des réserves de liquidation constituées sans payer d'impôt).
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Cette nouvelle ne constitue ni une recommandation d’investissement ni un conseil.