Ajouter des conditions à une donation
Que se passe-t-il si le donataire décède après la donation?
Vous avez l’intention de faire une donation, par exemple à vos enfants? Dans ce cas, il est bon de réfléchir au montant que vous souhaitez leur donner et à la manière dont vous voulez procéder. Car il faut savoir qu’une donation est définitive et irrévocable. Ce qui veut dire qu'en tant que donateur, vous ne pouvez pas réclamer le patrimoine donné a posteriori. Donné, c’est donné. Il existe néanmoins une exception: la donation faite à votre conjoint.
Vous pouvez assortir votre donation de toutes sortes de conditions. Dans cet article, nous abordons quelques-unes des conditions que vous pouvez prévoir en cas de décès du donataire:
Clause de retour conventionnel
En insérant une clause de retour conventionnel dans la donation, vous déterminez que la donation peut vous revenir si le donataire décède avant vous. Cela se fait en principe sans paiement de droits de succession. Une clause de retour peut dès lors être utile pour économiser les droits de succession.
Voici un exemple.
Vous êtes veuf et vous avez un fils et une fille. Votre fils n’a pas d’enfants, contrairement à votre fille. Vous avez donné à chacun un montant de 100 000 euros. Le destin frappe et votre fils décède brusquement.
Sans clause de retour, la donation tombe dans la succession de votre fils. En vertu du droit successoral légal, votre fille et vous êtes les héritiers légaux. Des droits de succession sont dus sur ce dont votre fille et vous héritez. Vous payez donc des droits sur le patrimoine que vous avez donné et votre fille paie des droits de succession élevés sur sa part.
En revanche, si vous avez prévu une clause de retour, la donation faite à votre fils peut vous revenir, libre de droits de succession. Vous pouvez alors redonner ce montant à votre fille moyennant le paiement de droits de donation (3% en Flandre et à Bruxelles, 3,3% en Wallonie) ou même sans frais si vous vivez encore cinq ans après la donation (à Bruxelles, le délai est encore de trois ans pour l’instant).
Vous pouvez décider que la clause de retour s'applique si le donataire n'a pas d'enfants, mais elle peut tout aussi bien s'appliquer si le donataire a des enfants.
Voici un exemple.
Vous avez fait don d'une somme d'argent (avec clause de retour) à votre fille, qui a deux enfants. Puis votre fille vient à décéder. Après le retour – libre de droits de succession – vous pouvez faire don de ce patrimoine aux enfants de votre fille décédée (vos petits-enfants) de manière fiscalement avantageuse. Et s’il n’y a pas de clause de retour? Les héritiers de votre fille (dont vos petits-enfants) en héritent alors directement et paient des droits de succession (qui sont généralement plus élevés que les droits de donation). La clause de retour peut donc également s’avérer intéressante fiscalement dans pareille situation.
Vous souhaitez, au moment du décès du donataire, pouvoir choisir si vous voulez ou non un retour, en tant que donateur? Dans ce cas, vous pouvez formuler une clause de retour facultative. Une clause de retour facultative, que le donataire ait ou non des enfants, vous offre la plus grande flexibilité.
Que se passe-t-il si votre enfant achète une maison avec l’argent donné? Si vous souhaitez qu'en cas de décès de votre enfant, la clause de retour s'applique à ce bien immobilier, vous devez prévoir une subrogation réelle. Attention: si vous effectuez une donation par don bancaire sur la base du modèle KBC, la clause de retour prévoit que vous obteniez une créance à hauteur du montant donné sur la succession du donataire. Cela signifie que les héritiers de votre enfant doivent vous payer un montant équivalent à la donation. Dans ce cas, avec la clause de retour, vous n'obtenez pas le logement qui a remplacé les fonds donnés.
Vous avez donné, avec votre partenaire, un patrimoine commun ou indivis à votre enfant et l'un de vous deux est décédé au moment du décès de votre enfant? Sachez alors qu’en principe, seule la moitié de la donation sera restituée.
Donation de residuo
Supposons que le donataire (votre enfant, par exemple) décède et que vous n'êtes plus là non plus. Dans ce cas, la clause de retour n'aura bien entendu plus d'effet. Si vous n'avez rien prévu d'autre dans l'acte de donation, les biens donnés seront répartis entre les héritiers de votre enfant. À moins que vous n'ayez stipulé dans l'acte de donation que le patrimoine donné (restant) doit revenir à un deuxième bénéficiaire. C'est ce qu'on appelle la donation de residuo.
Votre enfant (le premier bénéficiaire) peut utiliser librement le patrimoine donné (par exemple, le vendre ou même le dépenser entièrement). Vous pouvez toutefois prévoir dans la donation que votre enfant n'est pas autorisé à donner ou à léguer par testament le patrimoine donné à des personnes autres que le deuxième bénéficiaire.
Une donation de residuo peut s’avérer utile dans plusieurs cas de figure:
- Vous faites une donation à votre enfant sans descendance et vous souhaitez qu'après son décès, le reliquat de la donation revienne à son/ses frère(s) et/ou sa/ses sœur(s) d’une manière fiscalement avantageuse.
- Même si vos enfants ont eux-mêmes des enfants et que vous souhaitez optimiser la situation fiscalement. En effet, si le reliquat de la donation est transféré à vos petits-enfants au décès de vos enfants sur la base d'une donation de residuo, il peut être soumis aux droits de donation plutôt qu'aux droits de succession.
- En outre, la donation de residuo peut également être utilisée dans le cas de couples sans enfants où l'un des partenaires a fait une donation à l'autre. Ceci afin d'essayer, après le décès du partenaire, de faire revenir à la famille propre ce qui reste de la donation.
- Ou pour éviter que votre ex-partenaire n'hérite d'une partie de la donation que vous avez faite à votre enfant sans descendance si celui-ci décède après la donation.
Vous prévoyez une subrogation réelle? Dans ce cas, la donation de residuo s'applique également au patrimoine qui remplace la donation initiale (par exemple, si votre enfant achète un bien immobilier avec l’argent donné). Vous pouvez également voir avec votre notaire s'il peut être stipulé que la donation de residuo joue également sur les revenus de la donation.
Votre enfant et le deuxième bénéficiaire doivent tous deux accepter la donation de votre vivant. La donation de residuo ne peut être prévue que dans un acte notarié. Et ce, contrairement à la clause de retour (voir ci-dessus), qui peut se faire par don bancaire pour l’argent et/ou les titres. Sachez donc que si vous souhaitez faire une donation de residuo, elle entraînera des frais (de notaire) et sera en principe soumise aux droits de donation.
Notez qu’une donation de residuo nécessite la collaboration du premier bénéficiaire. Si vous donnez, par exemple, de l’argent et/ou des titres à votre enfant, il a intérêt à le(s) placer sur un nouveau compte sur lequel aucune autre transaction n'est effectuée. Votre enfant a également intérêt à conserver les extraits de compte/l'historique afin que l'objet de la donation (et ce qu'il en reste) soit clair. Sachez que votre enfant pourrait réduire le montant de la donation de residuo.
Qu’en est-il fiscalement?
Le premier bénéficiaire paie les droits de donation sur la donation au taux applicable entre le donateur et le premier donataire. Le deuxième bénéficiaire paie également des droits de donation au lieu des droits de succession sur la donation. L'avantage majeur de la donation de residuo est que le deuxième bénéficiaire est soumis aux droits de donation qui sont applicables entre vous, en tant que donateur, et le deuxième bénéficiaire. Vous faites par exemple une donation à vos deux enfants qui n'ont pas (encore) d'enfants? Et vous souhaitez qu’au décès d’un de vos deux enfants, ce qui reste de la donation revienne à votre autre enfant? Dans ce cas, vous pouvez essayer de conserver les biens donnés au sein de la famille par le biais d’une donation de residuo, avec application des droits de donation aux taux en ligne directe (parent-enfant) plutôt qu'entre frère et sœur, et sans paiement de droits de succession.
Ajout de conditions par la suite?
Vous ne pouvez plus ajouter de conditions à la donation a posteriori. Réfléchissez donc bien aux conditions que vous souhaitez prévoir.
Vous pouvez toutefois renoncer à certaines conditions de la donation par la suite. Il est préférable de discuter des possibilités et des conséquences juridiques et fiscales avec votre notaire et/ou un conseiller externe.
Conclusion
Si vous envisagez de faire une donation, il peut être intéressant de prévoir une clause de retour conventionnel. Une clause de retour facultative offre une certaine flexibilité pour tenir compte de votre situation familiale et de vos souhaits concrets au moment du décès du donataire. Comme la donation peut être restituée sans droits de succession, vous pouvez de surcroît réaliser des économies sur le plan fiscal.
Avec une donation de residuo, vous pouvez essayer de faire en sorte que ce qui reste du patrimoine que vous avez donné après le décès du donataire revienne à la ou aux personnes de votre choix. Une donation de residuo peut également offrir un avantage fiscal.
Vous pouvez prévoir dans l'acte de donation tant une clause de retour facultative qu'une donation de residuo. Il va cependant de soi qu'une clause de retour restera lettre morte si vous n'êtes plus en vie au moment du décès du donataire. Dans ce cas, la donation de residuo peut éventuellement avoir un effet. La donation de residuo peut toutefois également s'appliquer si vous, en tant que donateur, êtes encore en vie au moment du décès du donataire, et ce si vous ne faites pas usage de la clause de retour.
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