Collectionner, un voyage aux multiples méandres

Eduardo F. Constantini a remporté les enchères pour un tableau onirique de Leonora Carrington. Il y a trois décennies, il s’était retrouvé le sous-enchérisseur pour l’œuvre, qui lui avait échappé à 475 000 dollars. Lors de la Modern Art Evening Sale à New York, les enchères se sont envolées pour atteindre 28,5 millions de dollars. Sous les applaudissements de la salle, Constantini a enfin pu pousser un soupir de soulagement lorsque le tableau lui a été adjugé. La surréaliste Carrington n’a pourtant pas été le clou de cette saison des enchères de printemps.

Ces rendez-vous annuels new-yorkais, qui se déroulent durant une semaine en mai, sont les baromètres du monde de l’art. Avec des ventes prestigieuses de figures iconiques comme Monet, Basquiat & Warhol, Bacon, ou de jeunes artistes contemporains, l’issue semble assez prévisible. Christie’s a pourtant vécu le cauchemar de tout vendeur en ligne: son site a été la cible d’une cyberattaque quelques jours avant l’ouverture d’une des semaines les plus courues de l’année. Les collectionneurs passionnés ont alors eu la surprise d’être renvoyés vers une page web bien austère.

Quelles conclusions tirons-nous de ces différentes soirées d’enchères?

Sotheby’s, trois ventes live

  • Le commissaire-priseur Oliver Barker a abattu le marteau sur pas moins de 80 lots, pour un résultat total frôlant les 400 millions de dollars (hors frais). Durant la Modern Evening Sale, les Meules à Giverny de Monet ont atteint le plus haut résultat, à 30 millions de dollars, le Portrait of George Dyer Crouching de Francis Bacon, lui, raflant la mise dans la catégorie des Contemporary avec 24,5 millions de dollars.
  •  Le taux élevé de garanties financières, assurées tant par la maison de vente que par des tiers, assurait un filet de sécurité suffisamment solide au cas où le marché restait frileux.
  •  Par contre, pour The Now Evening Auction et ses nombreux artistes Young Contemporary, seules 5 des 17 œuvres étaient garanties. À 26 millions de dollars, les résultats additionnés ont aisément atteint la fourchette des estimations. Kerry James Marshall s’est très nettement distingué dans la catégorie, avec sa merveilleuse Vignette #6, un acrylique sur plexiglas adjugé à 6,5 millions de dollars.
  • La salle s’est enthousiasmée pour Justin Caguiat et Lucy Ball, et les enchères ont battu tous les records pour ces deux artistes contemporains. Seule la technique mixte sculpturale de Jeffrey Gibson, boudée par les enchérisseurs, a été retirée.
  • Les artistes féminines étaient bien représentées dans la Now Auction, avec une impressionnante proportion de 70% du nombre de lots et 55% des prix d’adjudication. Des œuvres de Avery Singer, Tracey Emin, Christine Quarles et Lynette Yiadom-Boakye ont de nouveau changé de mains.
     

Christie’s sous les coups d’une cyberattaque

  • Christie’s a démontré sa résilience et sa capacité à tenir tête dans des conditions difficiles. Malgré une grave cyberattaque quelques jours avant la vente, la maison est parvenue à organiser des soirées d’enchères consécutives où plusieurs résultats impressionnants ont été atteints.
  • Outre les ventes traditionnelles d’art des 20e et 21e siècles, la collection Rosa de la Cruz, avec des noms bien connus tels que Felix González-Torres, Ana Mendieta et Peter Doig, est également passée sous le marteau – pour une vente en gants blancs. Elle a atteint un montant total de 28,1 millions de dollars (hors frais), un résultat joliment situé dans la fourchette entre estimation basse et estimation haute. L’installation Untitled (America #3) de González-Torres a été remportée par le Pola Museum of Art, au Japon, pour 11,5 millions de dollars.
  • La grande surprise est venue de la vente d’art du 21e siècle, où le lot phare de la soirée a été retiré: Event (2004-07), de Brice Marden, dont l’estimation basse de 30 millions de dollars était garantie par la maison. Plusieurs autres lots d’envergure ont subi le même sort et les résultats globaux s’en sont ressentis. La vacation s’est soldée par un total de 66,5 millions de dollars, soit quelque 7% en deçà de l’estimation.
  • En dépit de ces retraits et de la cyberattaque, plusieurs lots ont réalisé d’excellentes performances. Pièce maîtresse de la soirée, The Italian Version of Popeye has no Pork in his Diet de Jean-Michel Basquiat est partie pour 27,5 millions de dollars.
  • La vente d’art du 20e siècle s’est soldée par un montant nettement plus élevé, à 346,5 millions de dollars, chiffre qui doit toutefois être nuancé: l’estimation était comprise entre 340 et 493,5 millions.
  • Parmi les moments forts de la soirée, les Flowers (1964) d’Andy Warhol, adjugées à 35,4 millions de dollars, se sont envolées bien au-delà de leur estimation haute de 30 millions. Le tableau Red Poppy de Georgia O’Keeffe est passé sous le marteau à 16,5 millions de dollars, et le Moulin de Limetz (1888) de Claude Monet à 21,6 millions. Adjugé à 33,1 millions, le Coin de Jardin avec papillons de Vincent van Gogh était lui aussi l’une des pièces maîtresses.
     

Phillips décroche la palme de l’enchère record

  • Il lui a suffi de sa vacation Modern & Contemporary Art Evening Sale pour que Phillips réalise la meilleure vente de toute cette semaine d’enchères de prestige new-yorkaises: Untitled (ELMAR), de Jean-Michel Basquiat, a été adjugé pour 40,2 millions de dollars à un enchérisseur par téléphone.
  • La majorité des enchères passent encore par téléphone. Parmi les trois maisons de vente, c’est Phillips qui compte le plus grand nombre d’enchérisseurs en ligne, et le plus grand nombre de lots remportés par cette voie.
     

Bron: Arttactic

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Cette nouvelle ne constitue ni une recommandation d'investissement ni un conseil.